CLERMONT-CHATTE (Aymar)



CLERMONT-CHATTE (Aymar{201} de), seigneur de Geyssans et de la maison-forte de la Bretonnière, que les historiens et les papiers du temps appellent généralement " M. de Gessans ", bien qu'il signât " de Chastes ", était le quatrième fils de Jacques et de Jeanne de Formerie, sa seconde femme, conséquemment, le frère de Pierre de Clermont-Chatte, autre " M. de Gessans ", qui, s'étant jeté de bonne heure dans le parti de la Réforme, s'empara de Romans, par surprise, le 30 septembre 1567, ayant été " commandé, dit-il, par des plus grands princes et seigneurs du Conseil, de venir en icelle ville, pour la garder et tenir la main à ce que, suivant les édits, le peuple soit contenu en paix, liberté de conscience et exercice de sa religion ; " ce pourquoi, il commença par faire entrer dans Romans quantité de soldats étrangers, qui pillèrent plusieurs habitants, saccagèrent les églises et mirent le feu au couvent des Cordeliers. Entré dans la carrière des armes, Aymar de Clermont-Chatte fut, au contraire, lui, comme du reste tous les autres membres de sa famille, un catholique décidé. Enseigne de la compagnie d'hommes d'armes du baron de Gordes, lieutenant général en Dauphiné, dès le mois de juin 1573, date à laquelle on le voit tenant la campagne, à la tête de quelques troupes, dans les environs de Chabeuil, pour y gêner l'action de Montbrun, qui fortifiait cette place, il était envoyé, deux mois après, par Gordes, au même Montbrun, qui se trouvait alors à Dieulefit, pour lui proposer la paix ; mais le chef huguenot préféra la guerre. Or, l'échec de cette négociation ne nuisit pas au négociateur, comme on pourrait le croire, car trois mois plus tard, Geyssans nommé vibailli de robe courte en Dauphiné, sur les instances de Gordes, devenait ainsi une sorte de magistrat militaire véritablement important dans les temps de troubles. Chorier raconte, du reste, qu'il était cher à ce dernier et nous savons, en outre, que c'est entre les bras de Geyssans que l'intègre et vertueux Gordes mourut à Montélimar, le 21 février 1578, l'ayant entretenu quelques instants auparavant d'une mission qu'il venait de remplir auprès du maréchal de Bellegarde, toujours en vue de pacifier le pays.
Gordes ayant été remplacé par Maugiron, Geyssans tint derechef la campagne dans les environs de Romans, et se trouvait notamment à la Côte-Saint-André, le 7 avril 1580, date à laquelle il écrivit au secrétaire de Maugiron, pour lui exposer que la noblesse, assemblée dans ce bourg, demandait l'autorisation de s'y fortifier, pour se défendre contre le peuple. Nommé gouverneur de Valence par Mayenne, avec charge de fortifier cette ville, le 19 octobre 1581, il dut, par suite, remettre sa citadelle en état, et la meubler de " chalits, matelas, paillasses et ustensiles ", dit une commission du 26 décembre suivant. Or, tout cela, il le fit si bien que le Parlement, qui soupçonnait plus d'un gouverneur de n'attendre que le moment favorable pour se révolter, lui fit demander par le conseiller Thomé au mois d'avril 1585, pour qui il tenait. " Pour le roi et non pour autre ", répondit Geyssans, ce qui le mit à l'abri du côté de l'autorité légitime, mais non du côté de la Ligue, pour qui il avait bien quelques sympathies, mais qui voulait autre chose. Aussi La Valette, passant à Valence dans les derniers jours de juillet 1586, profita-t-il de ce que Geyssans l'avait reçu avec politesse, pour le mettre hors de la citadelle.
Naturellement, fort déconfit de cela, Geyssans se rendit au bout de quelque temps en Normandie auprès du commandeur de Chatte, un de ses cousins, qui était gouverneur de Dieppe et qui le fit employer. Seulement, tandis que ce dernier n'hésita pas à reconnaître Henri IV après la mort d'Henri III, Geyssans, enrôlé sous la bannière de la Ligue et les ordres de Mayenne, leur fut fidèle jusqu'à la fin, et il arriva même qu'à la bataille d'Ivry, par exemple, les deux cousins combattirent l'un {202}contre l'autre, le commandeur étant un des meilleurs chefs de l'armée royale, tandis que Geyssans était un des bons lieutenants de Mayenne. On peut juger, du reste, de l'importance que notre Dauphinois avait dans l'armée de la Ligue, par ce fait, qu'étant arrivé à Rouen avec 200 arquebusiers, lorsqu'il s'agit de défendre cette ville menacée par le roi, c'est à Geyssans que fut donné le commandement du fort Sainte-Catherine, qui était la clef de la place, et il s'y comporta si bien, que ce n'est qu'après un investissement de plus de deux mois et 600 coups de canon tirés rien que contre le fort Sainte-Catherine, que les assiégeants se retirèrent (avril 1592). On perd ensuite la trace du seigneur de Geyssans, qui dut mourir peu de temps après, ayant fait, dès le 4 juillet 1589, un testament dans lequel il déclare vouloir être inhumé dans l'église de Saint-Bonnet-de-Galaure et donner l'administration de ses biens à sa femme, Madeleine-Françoise d'Hostun-Claveyson, qui l'avait rendu père de huit enfants. Il était chevalier de l'ordre du roi et gentilhomme de sa chambre.
#Anselme, viii, 937. - Arch. de Romans, BB, 11 et 12. - Chorier, Hist. gén., ii, 655, 663, 684. - Arch. de Valence, BB, 11. - Arch. Drôme, E, 3671. - Brun-Durand, Mém. d'E. Piémond, 159, 193. - De Thou, xi, 115, 118, 453, - Bull. d'archéol., xvii, 59. - Mss. Bibl. Grenoble, 1434. - Etc.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne

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