GAILHARD (Charles-Antoine-André-Marie de)



GAILHARD (Charles-Antoine-André-Marie de)), fils aîné de Jean-Antoine, conseiller en la sénéchaussée de Crest, et représentant du tiers état de cette ville aux Etats de Romans, naquit à Crest, le 5 novembre 1763. Avocat en Parlement, il postulait une charge de conseiller en cette cour ou un office de trésorier de France, quand éclata la Révolution ; mais il n'en accueillit pas moins celle-ci avec faveur, et dut à cela d'être élu procureur du district de Crest, en 1790, et procureur de la commune, le 22 octobre 1792. Il avait représenté, dans l'intervalle, la commune d'Aouste, à l'assemblée qui se tint à Chabeuil, du 19 au 29 mai 1790, pour désigner le chef-lieu et faire choix des premiers administrateurs du département de la Drôme ; puis, à l'assemblée électorale tenue à Romans, le 25 août 1791. Seulement, comme tout en acceptant les idées nouvelles, et même en adhérant, comme il le fit, le 1er novembre 1792, au " décret qui abolit pour jamais la royauté en France ", il ne cessa jamais d'être un homme d'ordre et d'opinions modérées, il devint naturellement suspect et fut même dénoncé comme tel, ce qui lui valut d'être mandé à la barre de la Convention, le 22 juillet {353}1793, pour n'avoir pas fait transférer aussitôt à Saillans, un individu de ce bourg arrêté à Crest. Il n'échappa même au Tribunal révolutionnaire, c'est-à-dire à la mort, que grâce à l'intervention d'un secrétaire du conventionnel Amar, qu'il avait connu à Grenoble et qui lui conseilla de chercher, comme tant d'autres, un refuge dans l'armée. Engagé dans le 18e régiment de dragons, où l'un de ses frères, ancien garde du corps, était officier, il servit donc pendant quelque temps en Italie, puis à l'armée des Pyrénées ; mais, n'ayant pas été oublié pour cela, il fut arrêté un beau jour et mené à Crest, où on l'incarcéra sous l'inculpation d'avoir, au temps où il était procureur de la commune, fait afficher un manifeste des Marseillais, entravé l'union des gardes nationales et fait obstacle à la vente des chapelles qui se trouvaient sur le territoire de Crest. Transféré ensuite à Romans, il fut relâché après le 9 thermidor, rejoignit alors son régiment et y servit jusqu'à la conclusion de la paix du 22 juillet 1795.
De retour à Crest, Ch.-A.-A.-M. de Gailhard se trouva d'autant plus naturellement désigné au choix des électeurs de son département, lorsqu'ils furent appelés à élire leurs représentants au Conseil des Cinq-Cents (15 octobre 1795), que la Convention, dont les excès les avaient depuis longtemps lassés, leur ayant imposé la réélection des deux tiers de ses membres, il s'agissait pour eux de ne prendre, en dehors de son sein, que des hommes d'opinions sages et de résolutions assez viriles pour pouvoir faire contrepoids. Ils l'élurent donc en même temps que J.-J. Aymé (V. ce nom) ; mais les Jacobins, après avoir inutilement tenté d'empêcher cette élection, tâchèrent de la faire annuler en se prévalant de ce que le frère du nouveau député était à l'étranger et que la loi du 3 brumaire interdisait toutes fonctions publiques aux parents d'émigrés ; et il aurait été invalidé sans l'intervention de Dumollard, qui démontra que la loi invoquée ne pouvait s'appliquer à un citoyen qui, revêtu de fonctions électives dès les commencements de la Révolution, n'y avait un moment renoncé que pour défendre sa patrie sous les drapeaux. Dénoncé derechef, le 17 ventôse an VI, par des habitants de Valence, il n'en conserva pas moins son mandat législatif jusqu'au bout.
Ce mandat ayant pris fin après le 18 brumaire, auquel il adhéra, notre Crestois devint alors, tout à la fois, membre du conseil général de la Drôme et directeur des contributions, fonctions dans lesquelles il fit preuve de tant de connaissances pratiques, qu'il fut question de lui confier des emplois plus élevés, notamment une préfecture, et qu'après l'avoir consulté sur la cadastration de la France, l'empereur le chargea de faire faire, à titre d'essai, celle de son département.
La Restauration le maintint dans son poste ; mais, bien qu'ayant été proposé pour cela, par l'administration préfectorale, le comte d'Artois refusa de le décorer, à son passage à Valence, le 14 octobre 1814, sous prétexte que " les directeurs des contributions n'étaient pas sur la liste des fonctionnaires auxquels on accordait la décoration " ; ce qui ne manqua pas de faire assez mauvais effet, mais ne l'empêcha pas de siéger sur les bancs royalistes, après qu'il eut été derechef élu député de la Drôme, au mois d'août 1815. Aussi le gouvernement de Louis XVIII ne crut-il pouvoir moins faire que de l'anoblir, l'année suivante, lui donnant pour armoiries : d'azur au dromadaire affaré d'or, suivant Riestap, bien qu'un de ses frères cadets, ayant été garde du corps, eut par cela même acquis la noblesse à sa famille, qui porte en réalité pour armoiries : d'argent à la croix d'azur, chargée en cœur d'un écu d'or au palmier de sinople.
Huit ans après, on le décorait et il était, dit-on, question de l'élever à la pairie, quand la révolution de 1830 mit fin à sa carrière politique ; car s'étant dès lors confiné dans la vie privée, il y resta jusqu'à sa mort, arrivée à Valence le 20 mars 1842 ; et cet exemple fut suivi par ses fils, dont le puîné, qui joi{354}gnait à son nom patronymique celui de sa mère, Marie-Thérèse Bancel, était auparavant substitut à Montélimar.
BIBLIOGRAPHIE. - I. Discours prononcé aux citoyens de la commune de Crest, réunis pour la formation de la garde nationale, le 22 vendémiaire an IV. Valence, in-4º de 4 pp.
II. Charles-Antoine Gailhard, représentant du peuple à ses collègues, 22 brumaire an IV. S.l. (Paris), s.d., in-8º de 16 pp.
III. Lettre du citoyen Gailhard, représentant de la Drôme au corps législatif. à ses concitoyens. (Paris, 26 floréal an IV). S.l.n.d., in-4º de 3 pp.
Rochas, qui n'a connu qu'une seule de ces trois publications de Ch.-A.-A.-M. de Gailhard, lui attribue un " mémoire sur la délimitation des départements de la Drôme, du Gard, de l'Ardèche et de Vaucluse ", dont il ne connaît pas le titre, dit-il. Malgré toutes nos recherches, nous n'avons pu le découvrir nulle part, et, cela étant, on peut d'autant plus croire que cette attribution est le résultat d'une erreur que le département de la Drôme ne peut avoir de limites communes avec celui du Gard.
#Biogr. Dauph., i, 407. - Et. civ. - Bull. d'archéol., xvii, 290. - Riestap, Arm. gén., ii, 1247. - Etc.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne

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