HAUTERIVES (Le Bienheureux Amédée d')



HAUTERIVES (Le Bienheureux Amédée d')) à qui l'on donne généralement pour auteurs Siboud de Clermont et une sœur du dauphin Guigues Ier, que les uns appellent Adélaïs et d'autres Pétronille d'Albon, appartenait en tout cas à une famille ayant une origine commune avec la maison de Clermont. On peut, du moins l'induire de ce fait que le Cartulaire de Saint-André-le-Bas appelle tour à tour Sotfredus de Claromonte et Soffredus miles de Alta Ripa un personnage de la fin du xie siècle, qui avait des biens dans les environs d'Hauterives et qui était, croyons-nous, l'oncle de notre bienheureux. Mais ce n'est pas une raison pour appeler celui-ci Amédée de Clermont d'Hauterives, comme le fait Rochas, attendu qu'il n'a jamais porté que le dernier de ces deux noms de terre et que ses successeurs dans la seigneurie d'Hauterives n'en portèrent pas d'autre non plus jusqu'en 1321, date à laquelle Ponce ou Poncet d'Hauterives, fils d'un autre Amédée, étant mort sans enfants, le régent du Dauphiné adjugea la terre d'Hauterives à Geoffroy de Clermont, proche parent du défunt.
Cela dit, rappelons que le Bienheureux Amédée d'Hauterives, qui était, ainsi que nous l'avons rapporté, neveu du Dauphin et, par cela même, cousin de l'empereur Conrad-le-Salique, naquit à Hauterives, dans le canton du Grand-Serre ; qu'il avait, outre la seigneurie de ce lieu, celle de quantité d'autres terres disséminées dans le Viennois, jusqu'aux portes de Vienne, et qu'il était marié et père de famille lorsqu'il abandonna tout à coup le {2}monde en 1119. Accompagné de son fils encore enfant et de nombreux gentilshommes ses vassaux, parmi lesquels étaient les seigneurs de Moirans et de Rives, il embrassa la vie religieuse dans l'abbaye cistercienne de Bonnevaux, qui venait d'être fondée, pendant que sa femme et celles de ses compagnons, suivant son exemple, allaient fonder, non loin de là, l'abbaye de Laval-Bressieux, qui fut transférée ensuite à La Côte-Saint-André. Il paraît même que l'abbé de Bonnevaux, qui était alors S. Jean, plus tard évêque de Valence, ne voulut pas d'abord l'admettre parmi ses religieux, lui faisant observer que la règle ne distinguait pas le seigneur et même le prince du serf, mais que le seigneur d'Hauterives insista, promettant de se charger des plus humbles travaux ; et, de fait, le dauphin Guigues Ier, son oncle, étant venu le visiter dans sa retraite, le trouva nettoyant les chaussures des moines et les enduisant d'une infecte drogue composée de lait de chèvre sauvage, de graisse de porc, de suif et de cendre, ce dont ce prince fut tellement touché qu'il embrassa son neveu en implorant sa bénédiction.
Dans les commencements de sa vie religieuse cependant, Amédée eut un mouvement de révolte. Ayant pu se convaincre que son fils ne recevrait pas une instruction suffisante à Bonnevaux, il s'enfuit avec lui à Cluny, la grande abbaye bénédictine, qui était alors un foyer de science, en même temps qu'un foyer de sainteté ; mais, y étant arrivé, il ne tarda pas à être saisi de remords et, s'étant alors séparé de son fils, qu'il envoya à la cour de l'empereur d'Allemagne, son parent, il revint aussitôt à Bonnevaux, pour s'y consacrer plus que jamais aux œuvres de pénitence. Et c'est là qu'il mourut en odeur de sainteté, environ l'an 1150, le 14 janvier, suivant certains auteurs, le 19 suivant d'autres ; il avait contribué pendant sa vie à la fondation des quatre premières abbayes filles de l'abbaye de Bonnevaux, celles de Mazan en Vivarais, de Léoncel dans les montagnes du Royans, de Montpeyroux en Auvergne et de Tamié en Tarentaise.
Quant à son fils, qui s'appelait également Amédée et mérita aussi le titre de bienheureux, envoyé, comme nous l'avons dit, à la cour de l'empereur d'Allemagne, il la déserta pour se faire moine à Clairvaux, devint ensuite abbé d'Hautecombe (1139), puis évêque de Lausanne (1144), et mourut en 1158 ou 1159, ayant été en outre tuteur d'Humbert III, comte de Savoie, et peut-être chancelier de l'empereur Frédéric Ier.
Rochas, qui fait mourir le B. Amédée d'Hauterives le 14 octobre, dit que la vie que l'on a de lui par un moine de Bonnevaux, fut composée en 1185, sur l'ordre de Burnon de Voiron, abbé de ce monastère ; or, il n'y a pas eu d'abbé de Bonnevaux de ce nom, mais seulement un archevêque de Vienne, qui siégeait en 1215-1219 et qui était auparavant doyen de cette église. Ajoutons que cette vie a été insérée par Manrique, dans ses Annales cisterciennes, et qu'on en trouve une traduction dans l'Histoire de plusieurs saints des maisons des comtes de Tonnerre et de Clermont (par le président Louis Cousin) et dans l'Essai de l'histoire de l'ordre de Cîteaux par D. Le Nain.
BIO-BIBLIOGRAPHIE. - Vie du vénérable Amédée de Clermont d'Hauterive, seigneur d'Hauterive, de Clermont, de Saint-Geoire, etc., moine de l'abbaye de Bonnevaux. S.l.n.d., in-fol. de 12 pp. (Publié par d'Hozier, d'après la copie mss. de Fr. Rolinon, prieur de Bonnevaux.)
#- Biog. Dauph., i, 254. - Chorier, Hist. gén., ii, 33. - Manrique, Laurea Evangelica, ch. 3. - Henriquez, Menolog., 355. - Lacroix, Notice sur Hauterives, 15 et suiv. - Moréri, Dict., au mot Amédée. - Hist. littér. de la France, xii, 575. - Nadal, Hagiol. 2e édit., 98. - Cart. de Bonnevaux, 313. - Etc.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne

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