FAURE DE VERCORS (Jordan)



FAURE DE VERCORS (Jordan ou Jourdain)), abbé de Saint-Jeand'Angély, personnage qui fut mêlé à l'une des plus sombres tragédies du règne de Louis XI, était de Die et très probablement le fils de noble Guigues Faure de Vercors, notaire et citoyen de cette ville en 1451. Entré dans l'ordre de saint Benoît, et non dans celui de saint Dominique, comme le dit Rochas, il était chamarier du prieuré de Saint-Marcel de Die et prieur de la Pierre en Gapençais, en 1454. Comment passa t-il de ces deux minces bénéfices à l'importante abbaye de Saint-Jean-d'Angély, vers 1471 ? Il est assez difficile de le dire ; mais on peut croire que c'est par la protection du dauphin Louis (XI), dont il aurait fait la connaissance pendant le séjour de ce prince en Dauphiné ; comme aussi est-il plus que vraisemblable que c'est grâce à lui que notre dauphinois devint aumônier du duc de Guyenne. En tout cas, il l'était depuis quelque temps, quand ce frère de Louis XI, qui fut un si grand embarras pour ce dernier, mourut le 12 ou le 14 mai 1472, " par poisons, maléfices, sortilèges et invocations diaboliques ", si l'on en croit le factum que le duc de Bourgogne publia quaranteneuf jours après, pour justifier une reprise d'armes contre le roi de France. Bien plus, celui-ci, qui se vit accuser de cette mort dès le premier jour, ayant aussitôt fait arrêter et interroger par l'archevêque de Bordeaux et quantité d'autres personnages érigés en cour de justice, l'abbé de St-Jean-d'Angély et un serviteur du duc de Guyenne, que l'on disait avoir été ses instruments en cette circonstance, Charles le Téméraire pose en fait, dans ce factum, que " frère Jourdan Faure, dit de Vercors, religieux de l'ordre de St-Benoist, natif de Dye, au pays de Dauphiné, conseiller et aumônier de feu mondit sieur de Guyenne, et Henry de la Ro{321}che, escuyer de cuisine d'iceluy feu seigneur, " ont déclaré devant lesdits juges, " avoir faict si détestable crime par l'ordonnance dudict Roy, qui leur avoit donné et promis grans dons, estats, offices et bénéfices, pour consommer cet exécrable parricide. " Ce qu'il y a d'à peu près certain, c'est que le duc de Guyenne étant à Saint-Sever avec la dame de Montsoreau, sa maîtresse, au mois de mai 1472, cette dernière mourut aussitôt après avoir mangé la moitié d'une pêche que lui offrait l'abbé de Saint-Jeand'Angély, et que le duc, qui mangea l'autre moitié, mourut au bout de quelques jours. Quant à l'empoisonneur, après avoir comparu devant une première commission de justice à Bordeaux, il fut brusquement emmené à Nantes, où une nouvelle commission, dont faisait partie le président du parlement de Grenoble, Pierre de Gruel, recommença son procès, que l'on suspendit encore une seconde fois et dont les pièces furent même anéanties, dit-on. Pour tout dire, il n'est pas douteux que l'on tâcha d'étouffer cette ténébreuse affaire, et l'on y arriva même si bien, que l'on n'est pas encore absolument fixé sur le degré de responsabilité de Jourdain Faure, non plus que sur le genre et sur la date de sa mort ; car, tandis qu'un historien affirme qu'il était encore enfermé dans la grosse tour de Nantes en 1474, un autre, qui ne donne pas de date, prétend que le geôlier de cette tour, qui entendait chaque nuit des " bruits horribles ", depuis que l'abbé de Saint-Jean-d'Angély y était enfermé, ayant pénétré chez son prisonnier le lendemain d'une nuit que le tonnerre était tombé sur la tour, le trouva " étendu dans la place où il couchoit, la tête et le visage enflés, noir comme charbon et la langue hors de la bouche, d'un demi-pied de long ", ce qui voudrait dire qu'il fut étranglé.
#Biogr. Dauph., i, 380. - Villet, Le Vercors. 167. - J. Chevalier, Mém. des frères Gay, 264, note. - Mém. de Comines, édit. Lenglet du Fresnoy, iii, 198 et 279. - P. Daniel, Hist. de France, éd. du P. Griffet, vii, 660. - D. Lobineau, Hist. de Bretagne. - Etc.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

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