LOQUE (Bertrand de)



LOQUE (Bertrand de)), controversiste protestant que Guy Allard fait naître dans le Champsaur, était, en réalité, de Valence, et s'appelait de {103}son véritable nom François de Saillans, comme le donne à entendre le jésuite Bordes, son antagoniste, dans un de ses écrits, et comme cela est maintenant prouvé. Fils de Gaspard de Saillans, seigneur de Beaumont, fervent catholique et l'une des plus importantes personnalités de Valence au commencement des guerres de religion, il dut prendre parti pour la Réforme à l'instigation d'Ennemond Bonnefoy, professeur de droit en l'Université et l'un des premiers sectateurs de Calvin dans cette ville, dont la femme, appelée Catherine de Saillans, était sa tante. En tout cas, il est un des signataires de la lettre que les protestants valentinois adressèrent à Genève, le 15 septembre 1559, pour demander un second ministre, et quand le juge Félix Bourjac signifia, le 9 avril 1560, aux chefs du parti huguenot à Valence, qu'il avait ordre de faire cesser toute sédition, il fut un de ceux qui lui répondirent qu'ils voulaient simplement faire prêcher la parole de Dieu ; il fut de même, avec Marquet, du nombre de ceux qui, bravant l'autorité, se réunirent en armes, au nombre de plus de 4000, le jour de Pâques suivant, dans l'église des Cordeliers, pour y faire la cène, ce qui donna lieu à une répression sanglante. Seulement, tandis que Marquet, Destrétis et d'autres furent arrêtés quelques jours après, François de Saillans, dont le père était alors à la tête du parti catholique dans Valence, put facilement s'enfuir et se réfugier dans les montagnes du Vivarais, du côté d'Annonay, où sa famille possédait le fief de Brézenaud, et, de là, gagner ensuite Genève, muni d'une lettre de recommandation du ministre Pierre Bise, en date du 17 septembre 1561, dans laquelle il est dit que " le porteur des présentes est fils de l'hoste de ce tyran La Motte-Gondrin ", et qu'il veut " estudier et se préparer au ministère ", les églises d'Annonay et de Peyraud se chargeant de son entretien. Or, on sait qu'à Valence La Motte-Gondrin logeait ordinairement chez Gaspard de Saillans, dont il était encore l'hôte lorsqu'il fut assassiné, le 27 avril 1562, et le soin avec lequel Pierre Bise s'abstient de nommer François de Saillans, en même qu'il était, de sa part, une mesure de précaution, permet de supposer que c'est alors que ce dernier changea de nom.
Se fit-il appeler aussitôt Bertrand de Loque ? Nous l'ignorons. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que, dix ans après, il n'était connu que sous ce nom-là, en Guyenne, où il jouissait déjà d'une si grande réputation comme controversiste, qu'on l'y alla chercher, pour l'attacher à la personne du duc de Bouillon, et que le duc de Montpensier, beau-père de ce prince, ayant décidé, vers la fin de 1572, sa fille, qu'il aurait voulu ramener au catholicisme, à être témoin d'une dispute théologique du P. Maldonat avec des ministres protestants, c'est lui, Bertrand de Loque, qui fut surtout chargé de tenir tête au célèbre jésuite portugais, qui l'appelle grand dialecticien, dans le compte rendu qu'il a laissé de ses conférences de Sedan. Neuf ans plus tard (1581), le vicomte de Turenne envoyait notre pasteur à Genève pour y faire connaître l'état des églises réformées de France et, devenu en 1591 prince de Sedan, par le fait de son mariage avec Charlotte de La Mark, ce même Turenne le fit venir comme ministre dans cette ville. Il n'est plus ensuite question de Bertrand de Loque qu'en 1597, date à laquelle il assista au synode provincial de Miremont en Guyenne, en qualité de ministre à Casteljaloux ; mais on sait par ses écrits, qu'il vivait encore en 1600.
On a de ce controversiste :
I. Traicté de l'Eglise, contenant un vrai discours pour connoistre la vraie église et la discerner d'avec l'Eglise romaine et toutes les fausses, assemblées, par Bertrand de Logue (sic). Genève, Eust. Vignon, 1577, in-8º. Ouvrage traduit en anglais en 1581.
II. Deux traités, l'un de la guerre, l'autre du duel, auquel est vuidée la {104}question, à sçavoir s'il est loisible aux chrestiens de desmesler un différent par le combat singulier, où aussi est desmelée la dispute du poinct d'honneur, dédiés au Roy de Navarre. 1588, petit in-8º de 104 pp.
III. Les principaux abvs de la messe, où sont découvertes et réfutées les plus remarquables erreurs de l'Eglise romaine touchant la doctrine, par B. de Loque, Daulphinois. La Rochelle, Hiérosme Haultin, 1596, in-8º. Cet ouvrage donna lieu à plusieurs réponses du P. Jean Bordes ou de Bordes.
IV. Reponse avx trois discovrs du Iesuite Loïs Richeome, sur le sujet des miracles, des saincts et des images. La Rochelle, Hiérosme Hautin, 1600 ; in-8º de 32 + 772 pp., qui lui avait été commandé par le synode provincial de Guienne, et qui est dédié aux pauvres de l'église réformée de " Bourdeaux. "
V. Tropologie ou propos et discours sur les mœurs, contenant une exacte description des vertus principales desquelles les vrais chrétiens doyvent être ornez. Lyon, Gabr. Cartier, 1606, in-8º.
On lui a aussi attribué, mais sans preuves suffisantes, disent les frères Haag, un Traicté orthodoxe de l'Eucharistie et sainct sacrement du corps et du sang de N.-S. J.-C. Lyon et la Rochelle, 1595.
#Biogr. dauph., ii, 91. - Essais sur Valence, éd. Lacroix. - Guy Allard, Bibl., 139. - J. Roman, Documents sur la Réforme et les guerres de religion. - Arch. de Valence. - J.-M. Prat, Maldonat et l'univ. de Paris. - Haag, France prot. - Revue du Dauphiné, vi. - Ed. Maignien, Dict. des anon.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne

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