ODOARD (Jean)



ODOARD (Jean{202}), riche marchand du temps de Charles VI et de Charles VII dont on a voulu, de nos jours, rattacher la famille aux Farnèse, était de Romans, où l'on trouve ses auteurs établis dès 1270 et que ses descendants habitaient encore au xvie siècle. Vraisemblablement petit-fils d'un autre Jean Odoard, receveur des deniers de cette ville en 1367, il était fils de Pierre Odoard, qui obtint, en 1407, l'inféodation de toutes les mines de fer et de plomb du mandement d'Allevard et, finalement, se fixa, prétend-on, à Paris, après s'être pendant longtemps occupé de monnayage en Dauphiné.
A l'exemple de son père, ce Jean Odoard acquit, vers 1421, le droit d'exploiter toutes les mines d'or, d'argent, de cuivre, de sinople ou d'azur et de plomb du Dauphiné, pendant quinze ans, sous condition de porter aux ateliers des monnaies l'or et l'argent qu'il pourrait extraire, et, le 12 mars 1422, se fit donner à ferme le monnayage de Crémieu, en s'engageant à prêter, avant la fin du mois, 6,000 livres, soit environ 300,000 fr. de nos jours, au régent, pour les besoins du royaume, ce qui peut donner une idée de l'importance de sa fortune.
Mais ce qui mérite vraiment bien autrement d'attirer l'attention c'est que, le tiers des bénéfices du monnayage affermé devant être retenu par lui jusqu'à remboursement complet de ses avances, les malheurs du pays lui firent oublier ses affaires personnelles.
Au lieu de s'occuper de la fabrication des monnaies, il aida à la défense de la patrie ; de là, pour lui, bien des mécomptes, car il fallut bientôt le remplacer comme maître ou directeur de la monnaie de Crémieu, dont les bénéfices finirent par tomber à rien.
Replacé en 1424, puis remplacé encore pour être replacé derechef il finit par abandonner la fabrication des monnaies et le Dauphiné, pour aller guerroyer contre les Anglais dans le Nord de la France. Or, il en résulta que le roi Charles VII lui ayant, une fois les Anglais chassés de son royaume (17 janv. 1436), concédé la moitié des bénéfices de l'atelier monétaire de Crémieu, pour le rembourser de ce qu'il lui devait encore, les officiers de cet atelier refusèrent pendant assez longtemps de se conformer à la volonté royale, parce que la moitié restante des bénéfices ne suffisait pas pour le payement de leurs gages. Et de fait, Jean Odoard ne toucha guère, de ce chef, que 100 livres tournois en trois ans, alors que sa créance était encore de 559 marcs d'argent ou 4472 livres ; ce qui décida le roi à lui abandonner en outre la moitié des bénéfices des monnayages de Romans et de Montélimar (1439).
Jean Odoard recouvra-t-il ainsi ce qu'il avait avancé au trésor public dans un moment de détresse ? Rien ne le prouve ; mais ce qui est acquis et ce qu'il importait de mettre en lumière, c'est que ce marchand romanais prouva qu'il avait une âme de chevalier, en négligeant des intérêts considérables pour courir sus aux envahisseurs de la France.
#Dr Chevalier, Annales, 94, et Arm., 168. - Arch. de l'Isère, B, 2817 et 2872. - Arch. de la Drôme, E, 3593. - Bull. d'archéol., xxii, 28. - Morin-Pons, Mém. du Dauph., 335, 337, 339.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne

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