RAMBAUD (Antoine)



RAMBAUD (Antoine)), avocat et controversiste, qui fut un des principaux défenseurs du tiers état du Dauphiné, dans le fameux " procès des tailles ", était fils de Gaspard, docteur et avocat de Châtillon-en-Diois, qui, étant venu habiter Die vers 1549, y fut, douze ans durant, juge de Meuglon, terre du chapitre cathédral, puis membre du conseil de ville (1562), enfin, consul en 1567. Vingt-sept ans plus tard (1594), Antoine Rambaud, docteur et avocat, lui aussi, était à son tour consul de Die ; chargé l'année suivante de se rendre à Lyon, auprès du roi Henri IV, pour solliciter la reconnaissance des libertés de la ville, dont il était le premier magistrat, il remplit si bien cette mission que ses concitoyens l'envoyèrent ensuite à l'assemblée de Dauphiné, tenue à Saint-Marcellin du 11 au 15 octobre 1597. Or, c'est par cette assemblée que l'avocat diois fut " requis d'accepter la charge de vacquer à la poursuite du procès en cour, nonobstant toutes excuses ", c'est-à-dire d'appuyer, conjointement avec Jean Vincent (voir ce nom) et Claude de Lagrange, les réclamations du tiers état devant les conseils du roi. L'esprit d'égalité commençant à percer, il s'agissait de faire un premier pas dans cette voie, en obtenant que la taille, autrement dit l'impôt foncier, qui frappait ou non les biens suivant que leurs possesseurs étaient roturiers ou nobles, les frappât au contraire suivant un classement une fois fait, en un mot, que de personnelles, les tailles devinssent réelles, pour nous servir des expressions du temps. Cette mission, Rambaud la remplit d'une manière vraiment remarquable, ainsi que le prouvent les deux plaidoyers qu'il fit pour la défense des intérêts populaires. Car, tandis que d'autres se contentaient alors, en semblable circonstance, d'assaisonner quelques phrases sonores, avec l'érudition pédante de l'époque, l'avocat diois discute, lui, avec une logique serrée, {293}d'heureuses expressions et de la hauteur dans les vues, mérites qui sont, du reste, également ceux des plaidoyers de Lagrange et de Jean Vincent. Mais tout cela n'aboutit qu'à l'arrêt du 15 avril 1602, c'est-à-dire à un soulagement momentané des populations, par le fait de la remise d'une partie des impôts arriérés.
Revenu à Die bien avant le prononcé de cet arrêt, Antoine Rambaud y fut avocat jusqu'au mois d'avril 1614, date à laquelle il devint juge épiscopal de cette ville au lieu et place d'André Avond, et c'est conséquemment par suite de quelque méprise que Rochas, qui n'indique pas ses sources, dit qu'il était conseiller du roi, référendaire au parlement de Grenoble, en 1611 ; car, indépendamment de ce qu'il ne figure pas sur la liste des membres de ce parlement, dans lequel il n'y avait pas, du reste, de conseillers référendaires, on comprend fort bien qu'il n'aurait pas accepté de devenir juge épiscopal de Die, étant conseiller au Parlement. Ajoutons qu'il résulte de quantité d'actes, qu'il habita sa ville natale jusqu'à sa mort, arrivée le 30 janvier 1630, c'est-à-dire environ cinq ans après qu'il eut cédé sa charge de juge épiscopal à son gendre, Jean de Collet d'Anglefort. Devenu juge, Rambaud, qui était un homme d'action fort peu imprégné de l'esprit huguenot, quoi qu'en disent Rochas et le docteur Long, ne se contenta pas de remplir consciencieusement ses fonctions : il fit de la controverse, défendant avec une extrême chaleur l'autorité du pape contre les professeurs de l'académie protestante de Die et contre le ministre Jean Martinet, de Saillans, qu'il traite, dans sa colère, de " pédant, sans front, sans barbe et sans vergoigne, qui, ne craignant pas de perdre ce qu'il n'eut jamais, a ramassé toutes les injures et calomnies que les ennemis du Christ ont inventé contre son lieutenant. " On peut par là se faire une idée du ton de sa polémique. Mais les années, et peut-être aussi les infirmités l'arrêtèrent assez promptement dans cette voie, tout en le laissant vivre ; en effet, son dernier écrit est de 1621, et, dès ce temps-là, il était en assez médiocre état pour que le mariage de sa fille Marie avec Jean de Collet d'Anglefort, fût célébré en partie, le 25 novembre précédent, dans le cabinet dudit sieur juge, " après quoi on mena les mariés à la Cathédrale, pour y recevoir la bénédiction nuptiale à la manière accoutumée ", disent les registres de catholicité.
Frère de Gaspard Rambaud, chanoine, sacristain, puis doyen de l'église cathédrale de Die, qui mourut le 26 juillet 1631, Antoine Rambaud le précéda de quelques mois dans la tombe ; car, c'est le 30 janvier 1630 qu'il mourut et le lendemain qu'il fut inhumé dans la nef de la cathédrale de Die. Il avait épousé successivement Emeraude de Villeneuve, décédée le 3 décembre 1618, et Philippe Agrel, dont la mort prématurée (16 août 1625), fut vraisemblablement la cause de sa retraite ; il laissa, entre autres enfants, un fils appelé Louis, qui épousa Blanche d'Armand huit mois après la mort de son père (25 sept. 1630), bien que n'étant encore âgé que de 16 ans, et qui, devenu ensuite courrier de l'évêque se conduisit de telle sorte que ce prélat le destitua de ses fonctions, le 3 décembre 1638, déclarant en outre, " ledit Rambaud et sa postérité indignes de jamais plus posséder, à l'advenir, aulcune charge dans ses éveschés et comtés de Valence et de Dye ", ce qu'on a peine à expliquer, étant donné que ce n'est qu'en 1674 que le même Louis Rambaud se fit protestant, en même temps que sa fille Suzanne, et vraisemblablement après cette date qu'il s'enfuit de Die, pour échapper à certaines poursuites. Il s'était rendu coupable d'irrévérence envers le Saint Sacrement, et comme il y avait récidive, il fut condamné, par contumace, comme {294}blasphémateur et impie, à avoir la langue coupée, puis à être pendu, brûlé et à avoir ses cendres jetées au vent, et de plus à 1,600 livres d'amende, applicables à l'achat d'une lampe destinée à brûler devant le maître autel de la cathédrale de Die, toutes choses qui ne furent pas exécutées, bien entendu. Or, singulier rapprochement, c'est dans le temps que l'évêque de Valence destituait Rambaud de ses fonctions de courrier (1638), que la sœur de ce dernier, Madeleine Rambaud, religieuse ursuline, née le 11 août 1607, fonda à Die, avec l'agrément et le concours du même prélat, un couvent de son ordre.
BIBLIOGRAPHIE. - I. Plaidoyé povr le tiers estat dv Davphiné, au procès qu'il a par devant le Roy et Nosseigneurs de son conseil privé. Contre les deux premiers ordres dudict païs. Paris, chez Jamet Mettayer, 1598 ; in-4º de 235 pp., suivi : 1º de Bref advertissement povr les gents dv tiers estat de Daulphiné, demandeurs... signé : Cl. de Lagrange, Vincent Rambaud et Billionet, et formant 11 pp. ; 2º de Povr letiers estat de Daulphiné. Inventaire des actes et pièces..., 38 pp. - Autre éd. comprenant le Plaidoyé, suivi de : Lettre servant d'apologie ou deffense pour l'Autheur du Plaidoyé du tiers estat de Daulphiné, escrite par iceluy à Monsieur Vincent, prévost de l'église Saint-Sauveur de Crest : A Monsieur Alian, docteur ès droit et advocat consistorial au parlement de Dauphiné et Au mesme... En tout 127 pages in-8º.
II. Plaidoyez povr le tiers estat de Dauphiné... A Paris, chez Jean Le Blanc, 1600 ; in-8º, de 35 ff., auquel sont joints les pièces annexes contenues dans la seconde éd. du I ci-dessus et Second Plaidoyé povr le tiers estat du Daulphiné. A Paris, chez Jean Le Blanc, 1600, in-8º de 112 ff.
III. Dialogue de la Vérité. A Paris, chez Pierre Mettayer, 1599 ; in-12 de 8 ff. n. chiffrés + 46 ff. chiffrés, dédié à Ennemond Rabot, premier président du parlement de Grenoble.
IV. Lettre escrite à Monsieur de Villeneufve, médecin du Roy, sur le suject des allegations qui se font aux discours, harangues et plaidoyers. A Grenoble, de l'impr. de Guillaume Verdier, 1610, in-8º de 36 pp.
V. Discovrs parénétique aux aduocats pour l'usage des citations du grec et du latin en leurs plaidoyez contre le discours du sieur Alexandre Paul de Filaire, Thoulousain. Paris, François Hvbi, 1611, in-8º de 95 pp.
VI. Tradvction de devx epistres de S. Hiérosme au pape Damase qui tenoit le siège en l'an 369, avec une paraphrase exemplifiée pour monstrer que l'authorité du Pontife Romain estoit telle en l'ancienne église qu'elle est aujourd'huy. A Tournon, Claude Michel. 1615, in-12 de 4 ff. n. num. + 56 pp.
VII. L'excellence de la svccession, ou est monstré que par le moyen de la succession des personnes, on se peut assurer infailliblement qu'elle est la vraye église et la vraye doctrine de Jésus-Christ. A Lyon, Pierre Rigaud, 1616, in-8º de 85 pp.
VIII. Le rocher de S. Pierre, contre leqvel les herétiques se brisent la teste, où est monstré qu'il estoit du tout nécessaire qu'il y eust un chef visible en l'église de Dieu ; et qu'il y est en effect, par son ordonnance expresse. Lyon, Pierre Rigaud, 1622 ; in-8º de 6 ff. n. num. + 92 pp., dédié à Alexandre Allemand, seigneur de Pasquiers.
IX. Epitaphe de saincte Paule, excellente dame romaine, traduit et mis en françois du latin de sainct Hierosme. A Grenoble, Pierre Verdier, 1622 ; in-8º de 100 pp., dont la dédicace à Mme la duchesse de Lesdiguières est datée de Die, le 17 janvier 1621, et dans lequel se trouve, pp. 75-82, un Discours à Monseigneur le duc de Lesdiguières, l'exhortant à recevoir la charge de connestable et se faire catholique, précédé d'une dédicace au même, datée de Die, le 1er août 1622.
#Biogr. Dauph., ii, 324. - Mém. Gay, 102. - Et. civ. - Long, Guerres de relig. - Arch. Dr., B, 6, 1043, D, 63. - Ed. Maignien, Imp. Gren., 29, 51. - Fr. prot.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne

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