ANDRÉ (Jean-Charles)



ANDRÉ (Jean-Charles)), un des plus curieux types de la société française au temps de Law, était de Montélimar et le fils ou le frère de François André, marchand de soies, qui vivait encore en 1715, date à laquelle il fut dispensé du logement des gens de guerre, à cause de la fabrique de soie qu'il avait dans cette ville. Etant allé faire à Paris le même commerce, vers 1697, il fut si heureux dans ses affaires qu'au bout de vingt-trois ans il achetait une charge de secrétaire du roi en la chancellerie de la Cour des Monnaies de Lyon pour s'anoblir ; ce qui ne l'empêcha pas de mourir insolvable, en 1727. Etabli à Paris, en même temps que son père, le fils ne réussit pas d'abord, puis, ayant fait un bon mariage, en 1736, devintalors seigneur de Montgeron et de la Guerche, après quoi il se ruina tout à fait. Mais s'étant ensuite lancé dans le système de Law, il y fit en très peu de temps une des plus scandaleuses fortunes de l'époque. " André, fils d'un peaussier de Montélimar, abîmé de dettes en 1718, et tellement décrié qu'un de ses créanciers avait offert 10,000 livres de billets signés par lui pour un déjeuner, se trouvait possesseur de 70 millions en 1720 ", dit M. Cochut, et cet auteur dit vrai, à la différence près que le peaussier était un marchand de soies. Or, trait de mœurs caractéristique, s'il en fut, devenu aussi puissamment riche, notre Montilien voulut se payer aussitôt un gendre de grande race et, bien que sa fille Marie-Charlotte André n'eût pas alors plus de trois ans, suivant les uns, de vingt mois, selon d'autres, il la fiança, le 20 mai 1720, avec Marie-Joseph de Brancas, marquis d'Oyse et frère du {25}duc de Villars-Brancas, ami du Régent, âgé de 33 ans. " L'extrême folie d'une part, et l'énorme cupidité de l'autre, firent, en ce temps-ci, le plus étrange contrat de mariage qui se soit peut-être jamais vu ", dit Saint-Simon, qui appelle André " fameux Mississipien ayant gagné des monceaux d'or. "
Et de fait, ce dernier donna, par ce contrat, 100,000 écus comptant à son futur gendre, de grosses sommes à son père et à son frère, pour les faire consentir à cette mésalliance, et, très probablement aussi, les 500,000 livres, dont 117,000 payés comptant en billets de banque, que le futur fut censé recevoir de ses père et mère, pour renoncer à leur succession. Enfin, on stipula que la future aurait quatre millions de dot, payables aussitôt après la célébration du mariage, qui devait avoir lieu quand elle aurait douze ans, et que l'on ferait, en attendant, 20,000 livres de rentes au futur. Seulement, comme la chute du système de Law mit au bout de quatre ans André dans l'impossibilité de tenir ses engagements, il s'ensuivit des " procès qui furent soutenus sans honte ", dit encore Saint-Simon, et que termina, en 1728, une transaction aux termes de laquelle le marquis d'Oyse conserva ce qu'il tenait d'André et reçut, en outre, de lui, à titre de dommages-intérêts, 45,000 livres comptant, la terre de la Jonchère, estimée 60,000 livres, enfin 300,000 livres en contrats sur l'Hôtel de Ville de Paris, que les créanciers du vaniteux financier firent plus tard réduire à 80,000 livres.
Après cela, Jean-Charles André de la Guerche disparut tellement de la scène qu'on ignore la date de sa mort et, pour ce qui est de sa fille, elle ne se maria pas et mourut à peu près ruinée à Paris, en 1798.
#De Coston, Hist. de Mont., iii, 344 et 348-51. - A. Cochut, Law, son système, 87 et 201. - Saint-Simon, Mém. éd. Garnier, xxxiv-75.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne

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