HUGUES (Saint) évêque de Grenoble)



HUGUES (Saint) évêque de Grenoble et l'un des prélats dont l'histoire est le plus liée avec celle du Dauphiné, naquit à Châteauneuf-d'Isère, vers 1053. Il était le fils du seigneur de ce lieu, Odilon de Châteuneuf qui, après avoir été témoin de la donation du lieu de Silhac à l'abbaye de Romans, par Guigues de Chalancon, vers 1081, consentit à la cession des églises de Clérieu à la même abbaye, par Guillaume de Clérieu. Avec cela, on lui donne pour frères Guinisius, chanoine de Romans, qui céda à cette église les droits qu'il avait sur le lieu de Voirasier ; Humbert, qui vivait encore en 1163, date à laquelle il fut garant d'une donation faite aux abbayes de Saint-Ruf et de Léoncel ; Guigues, cousin des Eynard de Domène ; Raymond, de qui nous parlerons plus loin (Voir ce nom), et Berlie, religieuse à Vernaison ; mais il y a de grandes raisons de croire que ce devaient être plutôt ses neveux. En tout cas, appartenant à l'une des familles les plus puissantes de la contrée, il fut pourvu, à 22 ans, d'un canonicat en l'église cathédrale de Valence et, quatre ans plus tard, l'évêque de Die, Hugues, légat du Saint-Siège, s'attachait le jeune chanoine qui, se trouvant avec lui au concile d'Avignon en 1080, fut alors demandé pour évêque par les députés de l'église de Grenoble, bien que n'étant pas encore prêtre. Par suite, il dut recevoir, coup sur coup, les ordres mineurs et majeurs, après quoi ne voulant pas être sacré par son métropolitain, qui était accusé de simonie, il alla recevoir à Rome l'onction épiscopale des mains du pape Grégoire VII, ce dont la fameuse comtesse Mathilde le récompensa en lui donnant une crosse et des livres de théologie et payant tous les frais de son sacre.
Or, arrivé à Grenoble, le nouvel évêque trouva toutes choses dans le plus déplorable état, le clergé ayant secoué toute discipline et la plupart des biens de l'église étant aux mains d'intrus laïcs qui en disposaient comme de leur propre bien. Voulant réformer le tout, il rencontra donc autant d'opposition de la part de ceux qui devaient être ses auxiliaires que de celle des seigneurs du pays, et tellement, qu'abreuvé de dégoûts il s'enfuit, au bout d'un an, à l'abbaye de la Chaise-Dieu (1082). Seulement, il revint ensuite, sur l'ordre du pape, et étant alors parvenu à ramener son clergé à plus de régularité, il eut, en 1084, la consolation de contribuer à la fondation de la Grande-Chartreuse par saint Bruno, en obtenant, de l'abbé de la Chaise-Dieu et de quelques seigneurs, la cession de la solitude dans laquelle s'éleva le nouveau monastère. Mais, en revanche, quelles difficultés ne rencontra-t-il pas lorsqu'il voulut récupérer les biens de son église ? D'abord, son métropolitain, l'archevêque de {10}Vienne, qui était alors Guy de Bourgogne, plus tard pape sous le nom de Calixte II, avait étendu son autorité épiscopale sur l'église de St-Donat et sur le comté de Salmorenc, et c'est pour établir les droits de son siège sur cette église et ce comté que l'évêque de Grenoble fit faire le précieux recueil de chartes connu sous le nom de Cartulaires de saint Hugues, ce qui n'empêcha pas le litige, pour la solution duquel le pape Urbain II vint à Romans en 1095, de durer jusqu'au 2 août 1107, date à laquelle il fut tranché par le pape Pascal II. Ensuite, il dut lutter contre le comte d'Albon, Guigues III, qui, non content de s'être approprié des biens ecclésiastiques et de lui faire la guerre pour les conserver, fomentait des divisions entre ses vassaux et ceux du prélat ; mais il finit, quand même, par l'amener à résipiscence.
Quant aux autres actes importants de l'épiscopat de saint Hugues, épiscopat qui ne fut pas de moins de cinquante-deux ans, puisque c'est le 1er avril 1132 qu'il mourut, ils sont fort nombreux. Rappelons la fondation de l'abbaye de Chalais, non loin de la Grande-Chartreuse, en 1108 ; la réforme du monastère d'Agaune, dans le Valais, et, pour ce qui regarde particulièrement la ville de Grenoble, dont notre saint évêque était seigneur temporel et spirituel, la construction du premier pont de pierre qui ait relié les deux rives de l'Isère dans cette ville, celle d'un hôpital, l'organisation de corporations ouvrières et, finalement, la remise qu'il fit aux habitants d'une partie du droit de leyde, en 1116. Il fut canonisé au concile de Pise, le 12 avril 1234, et l'église attenante à la cathédrale est sous son vocable ; quant à ses reliques, elles furent conservées dans cette église jusqu'en 1562, que les huguenots les détruisirent. Disons en outre que la fête de saint Hugues est, depuis quelque temps (1889), une occasion de pèlerinage à Châteauneuf-sur-Isère, son lieu de naissance.
Les Cartulaires de l'église cathédrale de Grenoble, dits de Saint Hugues, ont été publiés dans la Collection des documents inédits sur l'histoire de France, par M. Jules Marion (Paris, Imp. Nat., 1869, in-4º de 556 pp.). Quant à l'authenticité de ces cartulaires, elle a donné lieu à une polémique entre M.H. Gariel, conservateur de la bibliothèque de Grenoble, et M. l'abbé Trépier, dans le Bull. de l'Acad. delph., série 2, I, 54 et 94, et II, 204.
BIO-BIBLIOGRAPHIE. - I. Vie de saint Hugues, évêque de Grenoble, suivie de la vie de Hugues II, son successeur ; d'un extrait d'une biographie de saint Hugues, abbé de Léoncel, et d'une notice chronologique sur les évêques de Grenoble, par Albert du Boys. Grenoble, 1857, in-8º. - II. Notice historique sur saint Hugues de Cháteauneuf, évêque de Grenoble, par l'abbé Aristide Bouloumoy. Valence, 1892, in-8º. - III. Vita sancti Hugonis Gratianopolitani episcopi auctore Guigone Cartusiensi priore. Hanc editionem novam... Carolus Bellet. Monstrolii, 1889, in-8º, avec photo-grav.
#Biogr. Dauph., i, 440. - Cart. de l'égl. de Grenoble, 136. - Cart. de Romans, ch. 120, 190. - Cart. de Léoncel, 12. - Catellan, Antiq. de Valence, 220. - Gall. chr., xvi., 230. - Officia propria sanct. eccles. Gratianopolitanœ., 33. - Bull. d'arch., xx, 199, 322, 421 ; xxii, 177 ; xxvii, 123. - Sevestre, Dict. patrol. ii, 405, et Gurius, Vitæ sanctor., iv, 3.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne

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