MENURET DE CHAMBAUD (Jean-Joseph)



MENURET DE CHAMBAUD (Jean-Joseph et non Jean-Jacques)), médecin distingué né à Montélimar, le 23 janvier 1739, était le frère puîné du précédent. Ayant fait ses études médicales à Montpellier, " où il suivit de préférence les leçons d'Antoine Fizer, dont il adopta trop exclusivement les opinions bizarres ", dit le Journal des sciences médicales, il y prit le grade de docteur, puis se fit agréger en l'université de Valence ; après quoi il s'établit dans sa ville natale, où il acquit, en 1765, des héritiers du docteur Andéol Madier, l'office banal de conseiller-médecin ordinaire du roi, par lui revendu vingt ans après, et où il fut médecin de l'hôpital. Seulement, comme il était moins un praticien qu'un théoricien de beaucoup d'imagination, fort actif et très instruit, le séjour d'une petite ville ne lui convenait guère, d'autant plus qu'il se créa promptement des relations au dehors, en envoyant dès 1765 à l'abbé Expilly, pour son Dictionnaire de la France et des Gaules (IV, 232), une assez longue notice sur Montélimar ; puis, en faisant insérer dans le Recueil d'observations de médecins des hôpitaux militaires d'Hautesierck : Observations de médecine faites à l'hôpital de Montélimar, en 1765 (t. I, 331-348), Histoire médicotopographique de la ville de Montélimar et Mémoire sur une maladie épidémique observée à Montélimar en 1767 (t. II, pp. 121-190 et 231-258) ; et surtout, en fournissant à l'Encyclopédie de Diderot nombre d'articles généralement fort bien écrits. Par exemple, ceux qui accompagnent les mots Mort et Somnambulisme peuvent être cités comme des modèles de style, tandis que ceux qui traitent de l'inflammation et du pouls se distinguent plus particulièrement par leur esprit paradoxal et les théories audacieuses qui y sont émises. Mettant à profit ces relations, J.-J. Menuret alla donc habiter Paris vers 1780 et, y étant devenu médecin des écuries du roi et médecin consultant de la comtesse d'Artois, cela, - joint à des succès académiques qui lui firent conférer les titres de correspondant de {134}la Société royale des sciences et d'associé libre de l'Académie delphinale, - en fit un véritable personnage, qui ne crut pas pouvoir faire autrement que d'ajouter alors à son nom patronymique celui de sa bisaïeule, Madeleine de Chambaud, femme de Zacharie Menuret, vivant en 1655. Telle était même encore son importance, dans les premiers temps de la Révolution, que les électeurs du district de Montélimar le prièrent, le 19 septembre 1791, d'interposer ses bons offices auprès du Corps législatif pour obtenir que les séances de l'Assemblée électorale et du tribunal criminel de la Drôme ne se tinssent pas toujours dans la même ville, mais alternativement dans différentes localités du département, - ce qui n'empêche pas qu'il jugea bientôt prudent de quitter Paris et, suivant l'exemple de tant d'autres, qui se réfugièrent dans les armées pour échapper à la tourmente révolutionnaire, de se faire attacher en qualité de médecin à l'armée de Dumouriez. Or, il ne fut pas plus heureux pour cela ; car ce dernier l'ayant consulté lorsqu'il reçut l'ordre de se rendre à Paris pour y expliquer sa conduite, ce qui équivalait à l'ordre de porter sa tête sur l'échafaud : " Avec deux grains de désobéissance et autant de fermeté, je suis persuadé, mon général, que vous vous en tirerez fort bien ", lui répondit Menuret ; et l'on sait que Dumouriez tint compte de l'ordonnance de son médecin. Malheureusement il raconta l'anecdote et Menuret, ainsi compromis, dut bien vite se réfugier à l'étranger. Il alla habiter Hambourg, dont il étudia la situation, l'air et les eaux au point de vue médical, et, revenu en France après le 18 brumaire, il se fixa derechef à Paris, où il ne tarda pas à devenir médecin des pauvres et membre du comité de bienfaisance de son arrondissement ; fonctions intéressantes, mais pénibles qu'il remplit avec tant de dévouement et de zèle, que l'on put dire de lui après sa mort, arrivée à Paris le 15 décembre 1815, qu'" appelé dans les somptueux palais des princes et dans l'humble asile du pauvre, il consacrait à celui-ci sa première visite. " On a encore raconté de lui que, devenu septuagénaire, il répondit à un autre médecin qui lui demandait des nouvelles de sa santé : " Gràces au ciel ! je me porte encore assez bien ; mais j'ai du chagrin, la vieillesse m'enlève ma plus douce jouissance ; je ne puis plus monter au cinquième étage. "
Marié une première fois avec Louise Cartier de Boismartin, de Valence, qui mourut en 1773, sans enfants, J.-J. Menuret de Chambaud épousa ensuite Marie-Elisabeth Monneron, d'Annonay, sœur d'un inspecteur général des tabacs, qui lui donna un fils, mort célibataire, et une fille.
Indépendamment des articles dont nous avons parlé et d'autres publiés dans les Affiches du Dauphiné, années 1779-80, p. 171 ; 1780-81, p. 142 ; 1781-1782, p. 6 ; 1783-84, p. 214, et 1785-86, p. 188, Menuret de Chambaud a laissé les écrits suivants :
I. De generatione... Montpellier, Martel, s.d., in-4º. C'est sa thèse de docteur en médecine.
II. Nouveau traité du pouls. Amsterdam (Paris, Vincent), 1767, in-12.
III. Avis aux mères sur la petite vérole et la rougeole, ou Lettre à madame *** sur la manière de traiter et de gouverner les enfants dans ces maladies. Lyon, Perisse, 1770 ; in-12 de viii + 363 pp., dont il y a une traduction allemande (Leipzig, 1772, in-8º).
IV. Eloge historique de M. Vendel, professeur en médecine dans l'Université de Montpellier..., qui sera suivi d'un recueil ou précis de ses différents ouvrages, par J.-J. M. Grenoble, Cuchet, 1777, in-8º.
V. Essai sur l'action de l'air dans les maladies contagieuses, qui a remporté le prix proposé par la Société royale de médecine. Paris, 1781 ; in-12 de xxiv + 112 pp., dont il y a une traduction allemande (Leipzig, 1784, {135}in-8º) et qui fut couronné par l'Acad. roy. de médecine de Paris, le 15 février 1780.
VI. Réflexions sur l'arsenic, tendantes à déterminer la suppression du débit de ce minéral vénéneux. Grenoble, V. Cuchet, 1784, in-8º.
VII. Essai sur l'histoire médico-topographique de Paris, ou Lettres à M. d'Aumont, professeur en médecine à Valence, sur le climat de Paris, sur l'état de la médecine, sur le caractère et le traitement des maladies et particulièrement sur la petite vérole et l'inoculation. Paris, 1786 ; in-12 de xii + 293 pp., dont il y a une Nouvelle édition, augmentée de quelques lettres sur les changements et objets nouveaux que Paris présente depuis 1785, sur la vaccine, le galvanisme, etc. Paris, Méquignon et Bouvier, 1804 (an XIII), in-12 de xxxvi + 300 pp.
VIII. Mémoire sur la culture des jachères, couronné par la Société royale d'agriculture. Paris, chez l'auteur... et chez Belin, 1791, in-8º de 61 pp.
IX. Observations sur le débit du sel après la suppression de la gabelle, relatives à la santé et à l'intérêt des citoyens. S.l., mais impr. de Vézard et Lenormant, 1790, in-8º.
X. Essais sur les moyens de former de bons médecins, sur les obligations réciproques des médecins et de la société... Paris, 1791 ; in-8º de xvi + 150 pp., dont il y a une Nouvelle édition revue et augmentée de quelques notes relatives aux changements survenus dans cette partie depuis la première en 1791. Paris, Potey, 1814, in-8º de 168 pp.
XI. Essai sur la ville de Hambourg considéré dans ses rapports avec la santé, ou lettres sur l'histoire médicotopographique de cette ville. Hambourg, P. Châteauneuf, 1797, in-8º de 119 pp., dont il y a une traduction allemande, par M. G. Hermann (Hambourg, 1797, in-8º).
XII. Discours sur la réunion de l'utile et de l'agréable, même en médecine, lu à la séance publique de la Société philotechnique, précédé d'un avant-propos et de quelques considérations sur l'état de la médecine et des médecins en France. Paris, Colas, 1809, in-18.
XIII. Notice nécrologique sur P. Chapon, docteur en médecine. Paris, 1810, in-8º.
Il y a encore de lui, un Mémoire sur les cimetières, resté manuscrit.
#Biogr. Dauph., ii, 139. - De Coston, Hist. de Montélimar, i, 23, et iii, 255. - Journ. des sc. médic. 1816, p. 384. - Gazette de santé, 1816, p. 5. - Quérard, Fr. litt. - Delacroix, Stat., 558. - Dezeimeris, Dict. hist. de la méd. - Arch. Drôme, E, 1171.




Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901

Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne

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