Page 200 - Tous les bulletins de l'association des" Amis du Vieux Marsanne"
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Ensuite, on attachait à chaque morceau de morue, à l'aide d'un bout de raphia, une étiquette sur laquelle
            était noté le nom de la cliente. Il y avait lieu de changer l'eau souvent. La fille de Mme Vendran disait
            que  la  morue  était  dessalée  dans  le  bassin  de  la  place  publique,  "chose  qui  peut  paraître  aberrante
            aujourd'hui".
            La morue était le seul poisson disponible et il s'en consommait beaucoup.
            Entre 1930 et 1940, M. Charrère (père de "la Marguerite") vendait tous les vendredis du poisson frais
            devant l'épicerie de Mlle Maurel, sous la marquise : "il pesait avec son poids, tout le monde venait en
            chercher".

            Tous les épiciers vendaient des  fruits et légumes, "mais on n'achetait pas le premier légume  comme
            maintenant".  Avant  la  dernière  guerre,  "ce  sont  ceux  qui  en  cultivaient  qui  les  apportaient  dans  les
            épiceries". Ensuite, cette tradition a continué, "mais nous faisions aussi nos achats à Montélimar".
            Madame Petit y allait 2 à 3 fois par semaine, l'été, lorsqu'il y avait les "estivants". Elle se servait aussi
            chez les producteurs locaux, surtout pour les pêches.

            Les clients payaient toujours ce qu'ils emportaient, principalement avant les années 50. Ensuite, certains
            faisaient marquer : "on faisait l'avance toute l'année en attendant la récolte. C'est une maladie de faire
            marquer, car beaucoup pouvaient payer."


            Comment les commerçants réglaient-ils leurs fournisseurs ?
            Avant 1940, tous n'avaient pas de compte bancaire


            Monsieur Henri Peloux était mandaté par toutes les banques pour présenter les traites des grossistes aux
            commerçants qui payaient en espèces.
            Il  fit  cela  sur  17  communes,  en  plus  de  son  travail  de  secrétaire  de  mairie  de  Marsanne,  jusqu'en
            septembre 1939.
            Les marchands payaient à 30, 60, ou 90 jours et voyaient arriver l'encaisseur les 15 et 31 du mois.
            Les  gérants  des  magasins  Casino  ou  Ramade  payaient,  à  chaque  livraison,  la  précédente.  M.  Peloux
            n'allait pas chez eux.
            Les épiciers ne se plaignaient pas de leurs revenus, mais avant 1940 il n'y avait pas de TVA, ils n'étaient
            pas tenus à avoir une comptabilité sur le plan fiscal. Ceux qui voulaient savoir où ils en étaient, notaient
            leurs "entrées" et "sorties". Le peu de bénéfice qu'il y avait, était pour eux intégralement


            Comme tous les villages, Marsanne avait ses personnages pittoresques qui font encore rire aujourd'hui.
            Nous  n'avions  pas  "Lou  Ravi",  mais  Lisa  et  Marguerite  Charrère.  Que  de  souvenirs  pour  certains
            lecteurs !
            Lisa était la femme et Marguerite la fille du marchand de poissons. Elles ont habité toute leur vie au
            vieux village. Beaucoup se souviennent de "la Marguerite" puisqu'elle est décédée dans les années 1970.
            Lorsqu'elles se disputaient dans une épicerie, elles faisaient fuir toute la clientèle. De chez Mme Petit, on
            les entendait  jusqu'à la boulangerie proche de l'église.
            Il ne fallait pas les regarder, elles croyaient qu'on se moquait d'elles et vous vous entendiez alors traiter
            de tout un vocabulaire qui n'était pas des plus choisis !

            "La campagne" était servie par des épiciers ambulants

            Les fermes sont éloignées du village et il n'y avait pas une ou deux automobiles par ménage ! Entre les
            deux guerres, on comptait sept épiciers ambulants : "Caïffa", Mrs Petit, Burel et Baudoin, Mrs Elie de
            Montélimar, Dorier de Saint-Gervais et Souiol de Montélimar.
            Ensuite, il y eut Ramade et Vallon de Cléon, M. Petit avec son épouse qui firent les tournées de 1957 à
            1969, "Caïffa" jusque vers 1950. "Ils ne faisaient pas tort aux épiciers du village".
            M. Baudoin partait du vieux village avec son tricycle qui avait une caisse devant. Les Marsannais se
            souviennent de le voir descendre la Côte, puis prendre la route de Cléon d'Andran à toute allure. Peu
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