Page 67 - Associations des Amis du Vieux Marsanne
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TEMPS DE GUERRE 1914-1918
Le tableau idyllique va voler en éclats le 2 août 1914 avec la déclaration de guerre. Les pensionnaires
rentrent sans doute chez elles en catastrophe pour accompagner le départ au front d'un proche, et pour
retrouver leur famille. Les militaires mobilisés dans le Midi connaissent le baptême du feu en Alsace,
dans les Vosges et en Lorraine, puis, un peu plus tard, dans les plaines de Champagne et de la Marne.
Entre août et décembre, Marsanne perd d'emblée quinze de ses hommes mobilisés, soit le tiers des
victimes inscrites sur le monument aux Morts. Parmi eux, le commandant Auguste de Laselve, tué le 30
août à la tête de son bataillon dans les Vosges, à Gerbéviller. Faisant face, Mme de Laselve et son frère
le comte Charles de Montluisant, poursuivent leur soutien sans faille à Fresneau qui va bientôt prendre
une part active à la mobilisation de l'arrière
L'hécatombe des premières batailles renvoie en effet un nombre démesuré de blessés que les hôpitaux
classiques militaires ou civils ne peuvent accueillir. Les lois de 1905 ont expulsé les religieuses
infirmières des hôpitaux publics, omettant au passage la formation d'un personnel de remplacement
laïque suffisant.
La Croix-Rouge prend en partie le relai grâce aux trois sociétés de bénévoles déjà solidement formées :
la Société de secours aux blessés militaires (SSBM), l'Association des Dames françaises (ADF)
d'obédience catholique et l'Union des femmes de France (UFF) d'obédience protestante. Les
établissements sanitaires catholiques contribuent à l'effort, surtout dans les régions proches du front. On
n'oubliera pas non plus l'action déterminante des organisations féminines britanniques qui envoient
infirmières, médecins et matériel dès le début du conflit, bientôt suivies par les américaines et les
canadiennes.
Dès septembre 1914, sont créées dans chaque région militaire de nouvelles structures temporaires nées
d'initiatives officielles, mais aussi privées.
La Villa du Sacré Cœur devient ainsi, dès le 10 octobre 1914, l'Hôpital Bénévole HB 145 bis, d'une
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capacité de 37 lits, et dépendant de la 14 Région militaire de Grenoble. Remarque anecdotique : le HB
146 bis n'est autre que l'hôtellerie du monastère d'Aiguebelle avec 102 lits.
Marie Mouisset conserve la direction du lieu tout en se conformant aux diverses directives de gestion du
séjour des blessés émanant du Ministère de la Guerre. Elle aussi paye un lourd tribut à l'année 1914. Le
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25 septembre, son frère est dans les rangs du 75 Régiment d'infanterie lors de l'attaque meurtrière de
Lihons et du Bois-Madame, dans la Somme. Blessé, il est fait prisonnier et envoyé aux camps de
Güstrow, puis de Zerbst. Il en réchappera en 1919. Le 25 décembre, son père décède prématurément
après, sans doute, un infarctus.
Mais rien n'entamera l'énergie de la jeune femme qui met toutes ses compétences d'infirmière au service
des victimes des combats qui sont confiées à l'hôpital. Elle est secondée par un personnel dévoué et des
collaborations amicales, telles Mlle Julienne Raffin, les demoiselles Ronce et Estran, ou encore Léon
Silie, pensionnaire très attaché à Fresneau, mais contraint de rejoindre sa famille à Montpellier.
Les courriers amicaux conservés pour cette période témoignent de l'angoisse permanente dans chaque
famille pour un fils ou un parent au front, mais aussi du grand élan de solidarité des femmes pour
seconder les personnels soignants dans tous les lieux d'accueil des blessés.
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